La couleur noire : amie ou ennemie ?
Le noir en peinture, ami ou ennemi ?
Jusqu’aux Impressionnistes, on ne se pose pas la question : la couleur noire est utilisée par les peintres.
Les Impressionnistes, eux, ont renversé les théories classiques de la peinture et ont supprimé l’utilisation du noir dans leurs tableaux.
Quels sont (quelques uns de) leurs arguments ?
Le noir tel quel n’existe pas dans la nature.
Les zones les plus sombres ne sont jamais vraiment noires.
Le noir peut être créé par le mélange de plusieurs couleurs.
Une zone peut sembler noire grâce aux couleurs qui sont autour.
N’oublions pas également que les Impressionnistes étaient les peintres de la lumière : c’est grâce à une technique extrêmement maîtrisée des couleurs qu’ils reproduisaient ombres et lumières.
Bienvenue dans ce blog où je raconte un peu de ma vie d’artiste peintre.
J’y partage également des techniques de dessin ou de peinture et bien sûr, toutes les astuces acquises au fil des années.
D’un point de vue physique, le noir est une non-couleur puisqu’il n’est pas présent dans le spectre lumineux et qu’il absorbe les couleurs. C’est le contraire pour le blanc qui renvoie les couleurs.
Mais pour nous peintres, le noir et le blanc font bien partie des couleurs.
Bon à savoir : cet article s’adresse aussi bien à l’huile qu’à l’acrylique.
1 – Pourquoi utiliser du noir dans ses tableaux ?
Dans ma pratique et dans mon activité de professeure, je pars du principe qu’il n’y a pas d’interdit. Sauf technique, comme la règle du gras sur maigre ou la règle du huile sur acrylique et non l’inverse.
Le noir existe, je ne vois pas pourquoi on s’interdirait de l’utiliser.
De plus, on peut compter sur l’exemple des Maîtres. Voir les deux photos ci-dessus. Personne ne penserait que Vélasquez et Delacroix ne savaient pas ce qu’ils faisaient ! Hors, ils utilisaient du noir.
Anders Zorn, peintre suédois du XIXeme/XXème siècle a même créé une technique qui porte son nom en peignant uniquement avec du noir, du rouge, de l’ocre jaune et du blanc.
Si vous peignez des tableaux abstraits, vous pourrez avoir envie d’un vrai noir. Exemple en photo avec Kandinsky.
En plus d’être utilisé pour foncer, le noir a un super pouvoir : il rabat les couleurs, c’est à dire qu’il enlève de son intensité à la couleur.
Si vous voulez casser une couleur trop vive, pensez au noir.
Ceci étant posé, voyons quelle sorte de noir utiliser : noir du tube du commerce ou noir fabriqué ?
2 – Les différents types de noir
Les noirs en tube du commerce contiennent tous du bleu, c’est un point important à garder en tête lors des mélanges.
Bon à savoir : si vous voulez savoir si une couleur contient une couleur cachée, il suffit de lui ajouter un peu de blanc pour la faire ressortir.
Je vais mentionner ceux qui sont le plus souvent utilisés.
– Noir de Mars, PBk 11
C’est un noir très couvrant, très colorant et très stable à la lumière et dans les mélanges. D’ailleurs, toutes les couleurs dites « de Mars » le sont.
Il sèche vite et c’est un avantage, comparé au noir d’ivoire dont je parlerai plus bas.
Il est assez froid et bleuté : c’est parfait pour obtenir de très beaux gris lorsqu’il est mélangé au blanc ou à l’ocre jaune.
Assez facile d’utilisation, attention cependant, lorsque vous l’employez, c’est un noir qui prend le pas sur toutes les autres couleurs si on en met trop !
Bon à savoir : retrouvez les explications sur le code des pigments dans l’article Comment lire les infos sur un tube de peinture.
– Noir d’ivoire, PBk 9
Le plus répandu dans les boîtes de couleur. Il est beaucoup moins opaque que le noir de Mars et tout à fait stable dans les mélanges.
Il sèche lentement.
Étant un peu moins colorant, il provoquera moins d’erreur si on est hésitant ou débutant.
On l’utilise avec du bleu outremer pour fabriquer le gris de Payne et avec du blanc ou de l’ocre jaune, il donnera des gris plus chauds que le noir de Mars.
Bon à savoir : pour en savoir plus sur la notion de transparence et d’opacité, voyez l’article Comment lire les infos sur un tube de peinture.
3 – Pourquoi utiliser un noir en tube ?
– Il est prêt à l’emploi, ce qui est quand même un avantage !
– Si vous recherchez un « vrai » noir, le plus noir possible, vous ne le trouverez effectivement que dans les tubes du commerce.
– Il est plus neutre en couleur que celui que vous allez fabriquer, donc peut être considéré comme une base pour créer d’autres couleurs.
4 – Pourquoi ne pas utiliser le noir en tube ?
– Très souvent, on en met trop. Hors, c’est une couleur extrêmement forte et elle va vampiriser les autres. Si on utilise un mélange des 3 couleurs, rouge, jaune, bleu, on évite de surdoser ses couleurs avec le noir intense sorti du tube..
– On peut fabriquer des noirs très beaux par mélanges qui seront donc des noirs colorés selon ses goûts et ses besoins. Par exemple, si on a envie d’un noir chaud, le fabriquer par mélange permet de contrôler exactement sa nuance et sa température.
– Les débutants ont tendance à en abuser dans les ombres.
Attention, une ombre n’est pas noire ! Elle est toujours colorée. Si on part du noir pour peindre une ombre, on risque de se retrouver avec une zone hyper foncée « trou noir » qui gâchera complètement le reste du tableau.
La meilleure solution pour ne pas tomber dans ce piège est là aussi de fabriquer la couleur de l’ombre en cherchant précisément quelle est cette couleur. Sans se précipiter sur son tube de noir.
Les ombres dans la peinture à l’huile, c’est un GROS morceau dans la réalisation d’un tableau qui nécessitera un article ultérieur.
– Mal dosé, il risque de provoquer des embus (zones ternes) ou même des craquelures et il faut vraiment l’utiliser en couches fines.
– Enfin, le noir peut avoir un effet grisant plutôt que fonçant. Il ne faut pas croire qu’on va foncer systématiquement une couleur avec du noir, on risque de la rendre simplement plus terne, plus grise. Pourquoi ? Parce que le noir, comme je l’explique plus haut « casse » la couleur à laquelle il est ajouté.
5- Comment fabriquer les noirs ?
– En mélangeant du rouge, du bleu et du jaune.
Tout est une question de dosage et il n’y a pas de recette magique. Je vous conseille de faire des essais en mélangeant ces 3 couleurs.
Vous verrez qu’il est difficile d’obtenir un noir d’encre. D’où l’intérêt des noirs du commerce.
Par contre vous allez obtenir des noirs magnifiques, qu’ils sera facile de rendre plus bleus, plus rouges, plus orangés etc. Vous maîtriserez également la température de vos noirs : plus ou moins froids ou chauds.
En ajoutant du blanc, vous créerez des gris colorés, indispensables dans vos tableaux.
– En mélangeant du brun et du bleu.
J’utilise la Terre d’Ombre Brûlée pour foncer mes couleurs et fabriquer une couleur très foncée proche du noir.
J’y ajoute du bleu, le plus intense possible, par exemple de l’outre-mer ou du bleu de Prusse. Attention au dosage, ce dernier est très puissant.
J’obtiens ainsi un noir très satisfaisant.
Mais j’utilise aussi du Noir d’ivoire, sans me poser de question ;-)
Voilà pour cet article qui vous a éclairé, j’espère, sur l’utilisation du noir dans vos tableaux.
Dîtes-moi comment vous procédez, vous êtes plutôt tubes du commerce ou fabrication maison ?
N’hésitez pas à poser vos questions en commentaire.
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