Un essentiel du dessin : la gomme mie de pain

Un essentiel, vraiment ?

Quand j’annonce à mes élèves qu’on va faire un exercice de dessin sans utiliser la gomme, un chœur de protestations s’élève :-)

Gomme et crayon vont de pair dans tous les esprits quand on se lance dans le dessin. Personne n’imagine laisser sur le papier les erreurs de tracé, voire les traits de construction du début. Au contraire, il faut que tout soit PARFAIT. Rien qui dépasse, tout est contrôlé. A vos rangs, fixe !

Je me demande si notre attitude anxieuse vis-à-vis de l’utilisation de la gomme et cette volonté d’effacer les tracés qui semblent erronés ne nous vient pas de nos années d’école, quand on était grondé si on faisait des traces sales sur nos pages d’écriture ? 

On a été conditionné à rendre un  travail propre  et sans rature. Parfait de bout en bout. C’est peut-être pour ça qu’on voit tant d’apprentis dessinateurs et dessinatrices qui s’accrochent à leur sacro-sainte gomme. 

Soyons clair.e.s, je ne vais pas vous dire qu’on ne doit pas gommer !

 La gomme est utile et tout le monde l’utilise ! Cependant, se lancer le défi d’un dessin sans gommer un trait est un exercice extrêmement bénéfique qui permet de progresser rapidement. J’en reparlerai dans un autre article concerné à la créativité. 

A la fin de cet article, je vous donnerai une astuce simplissime pour dessiner sans avoir besoin de recourir trop souvent à la gomme.

1 – La gomme typique de l’artiste : la gomme mie de pain.

C’est ZE gomme dont se servent tou.te.s les professionnel.le.s. 

Facile à reconnaître, elle ressemble à un bout de pâte à modeler grise. 

Mie de pain ? On ne servait quand même pas de vraie mie de pain pour effacer ? Eh bien, si, et d’ailleurs, si vous êtes à court de gomme, vous pouvez toujours vous précipiter sur votre baguette du jour et en prélever un peu de mie pour gommer vos dessins. Ca fonctionne !

La gomme classique telle que nous la connaissons a été fabriquée grâce à la diffusion du caoutchouc au XVIIIème siècle. 

2 – Comment se présente et s’utilise une gomme mie de pain ? 

A l’achat, c’est simplement un morceau de gomme rectangulaire dans une petit boîte ou enveloppée de plastique. Elle est gris clair (mais elle ne va pas le rester longtemps !).

Bon à savoir : je vous recommande vivement de ne pas acheter un 1er prix : nous en avons fait l’expérience à l’Ecole d’art, elle reste dure et impossible à malaxer correctement. 

Le principe est donc de malaxer ce petit parallélépipède de gomme. 

Ne l’utilisez pas telle que sortie de sa petite boîte, vous passeriez à côté de toutes ses possibilités. Au contraire, sa texture de pâte à modeler va vous permettre de lui faire prendre toutes les formes qui vous intéressent.

On peut la modeler en pointe pour effacer un trait fin de façon précise ou on peut la laisser en morceau assez gros ou en boule pour travailler sur une partie de dessin plus large.

Il suffit de la re-malaxer quand on a terminé pour lui donner une forme facile à transporter : je vous conseille, soit de la remettre dans sa boîte, soit de lui trouver une petite boîte pour la conserver au milieu de votre matériel. Vous éviterez aussi qu’elle sèche.

3 – Comment l’utiliser ? 

Il y a deux façons de faire. 

On peut gommer de façon traditionnelle en passant la gomme sur la surface à effacer. C’est une façon très pratique d’ouvrir des surfaces claires (on dit : ouvrir les blancs) dans un dessin. 

On peut également tamponner ou rouler la gomme sur la surface à effacer : magique, la gomme va retirer les particules de crayon, de fusain, de sanguine ou pastel sans abîmer le papier.

Car c’est là le grand avantage de cette gomme mie de pain : elle n’abîme jamais le papier puisqu’elle n’est pas abrasive. Les particules de crayon prises dans les fibres du papier adhèrent à la surface de la gomme quand on la passe dessus. A aucun moment elle ne gratte la surface du papier. 

Autre avantage : elle ne laisse aucune pelure.

Avec un peu d’habitude, vous verrez que vous pouvez gommer/enlever de la matière en grande quantité mais aussi agir en subtilité en tamponnant plus ou moins légèrement la surface à éclaircir. C’est ainsi que vous pourrez laisser plus ou moins de matière et donc créer des demi-tons ou des dégradés.

4 – Est-ce qu’elle gomme tout ? 

Non. 

Elle fonctionne très bien sur les matières poudreuses, comme le fusain, la sanguine, le pastel également même si elle se retrouve sale très vite.

Elle ne fonctionnera pas sur le crayon graphite très foncé ou la pierre noire. 

Autre inconvénient qu’il est cependant facile d’éviter : elle peut laisser du gras car elle absorbe le sébum des doigts du dessinateur. Un conseil : ne la gardez pas dans la main, reposez-la sur la table ou sur le bord du chevalet quand vous ne l’utilisez pas, vous éviterez ainsi de la charger en sebum. 

5 – Comment la nettoyer :

Vous pouvez simplement la malaxer et le remalaxer jusqu’à retrouver une surface plus  propre. Mais même usagée, la gomme mie de pain dure très longtemps. 

Quant aux autres gommes, la très connue rose et bleue ou la gomme plastique, elles gomment mieux les outils durs comme le crayon graphite. Leur inconvénient est qu’elles laissent des petites pelures et surtout qu’elles attaquent le papier. Hors, il est impossible de dessiner correctement sur un papier abîmé. Quand il n’est pas purement et simplement troué ou arraché.

C’est normal puisqu’elles fonctionnent de façon abrasive. 

Il faut faire également très attention à ce qu’elle soit extrêmement propre avant de l’utiliser, c’est très vite arrivé de laisser de vilaines traces de crayon sur son dessin. 

Pour conclure :

Mon conseil est de gommer avec parcimonie pour ne pas abîmer votre papier. L’idéal étant de gommer à la fin de votre travail, histoire de nettoyer. 

Mais alors, comment éviter de trop gommer ?

C’est assez simple : dessiner dès le début de votre travail avec des traits trèèèès légers, donnez-vous du temps pour construire votre dessin. Les erreurs de tracé se verront moins et si vous voulez les effacer, vous n’aurez pas à forcer sur le papier.

Par la suite, vous reviendrez avec plus d’assurance sur vos traits.

Que vous fassiez un dessin aux détails très précis ou un dessin plus libre, gardez ce procédé en tête : commencez léger. 

Et si vous essayiez ce petit exercice pour passer à la pratique ? il vous faut un fusain et une gomme mie de pain. Passer du fusain sur toute la surface du papier et « dessiner à la gomme » : ouvrez des blancs avec la mie de pain pour faire naître le dessin. Il suffit d’ajouter des traits plus foncés par la suite pour rehausser les zones sombres. 

C’est un exercice typique des cours de dessin.